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De tréfonds en combles

Ecrit par Arthur Guiffant

« Oh Djadja, y a pas moyen Djadja, j'suis pas ta catin Djadja genre, en catchana baby tu dead ça ! »

Son casque audio rose fuchsia vissé sur les oreilles et son iPhone dernier cri recouvert de paillettes en main, Agathe s'ambiançait allègrement sur les paroles ô combien subtiles d'Aya Nakamura, enchaînant les déhanchements disgracieux comme la chanteuse enchaînait les incohérences langagières ; autrement dit, elle dansait comme si personne ne regardait – et Dieu soit loué, c'était le cas.

L'étudiante en était là de ce que l'on pourrait le mieux décrire comme une danse de la pluie – et encore, ce serait faire injure aux peuples amérindiens – lorsqu'un objet sphérique du diamètre d'une balle de tennis vint briser son carreau et son arcade sourcilière. Puis ce fut l'explosion.

Avec un vacarme retentissant, la grenade fumigène, puisque c'en était une, déversa son nuage opaque verdâtre, tandis que trois hommes entièrement vêtus de noir s'infiltraient par

la fenêtre démolie.

« Go, go, go ! »

Sans qu'elle puisse se rendre compte de quoi que ce soit, Agathe fut saisie par la taille et juchée sur une épaule comme un sac de pommes de terre, avant d'être évacuée par son sauveur tombé du ciel. Étrangement, il se dégageait une très forte odeur d'encens.

« Bonjour ma fille, entama le premier des trois hommes, nous sommes D.I.E.U.

- Je vous demande pardon ?

- La Division d'Intervention pour les Exorcismes d'Urgence. D.I.E.U. quoi.

- Ah, c'est pour ça les robes et les croix de punks autour du cou !

- Ma fille, nous avons la preuve que votre appartement étudiant est devenu… la demeure de Satan ! »

Une musique dramatique sortit de nulle part.

« Keuwa ?

- Oui, regardez, c'est écrit là, dit le prêtre interventionniste en sortant un papier de sa poche.

- Mais… C'est un médian de MT90 ça ? »

Une expression d'horreur traversa le visage des trois hommes d'Église, alors qu'ils voyaient défiler leurs vies devant leurs yeux.

« Jésus Marie Joseph ! Ne prononcez pas le nom maudit ! Tabernacle !

- Oui ?

- Non, pas vous, agent Tabernacle, je m'exclamais en québécois.

- Oh.

- Allez y mes frères, fouillez les lieux de fond en combles, afin que plus jamais l'âme de cette pauvre fille ne soit tourmentée.

- Je ne suis pas tourmentée ! S'offusqua Agathe alors qu'on mettait à sac son appartement.

- Je vous en prie ma fille ; vous écoutiez « Djadja », vous êtes tourmentée. Allons, retournez chaque annale, videz chaque écocup, et exorcisez, exorcisez ! N'omettez aucun détail, car comme vous le savez…»

Le prêtre enfila une paire de lunettes de soleil et prit une pose stylée.

« … Le diable est dans les détails.

- YEEEEEEEEEEEAH !»

FIN